23 settembre 2020

Uno studio sul sedevacantismo che scrissi circa otto anni fa (in francese: finora non ho mai trovato il tempo di tradurlo in italiano)

Nota postuma: rispetto all'epoca della composizione di questo breve studio (luglio 2012) che mi fu commissionato da un Sacerdote per aiutare la riflessione di un suo parente, ho leggermente modificato la mia posizione personale. Viviamo una crisi epocale che concerne non solo la fede e la morale, ma prima di tutto la ragione stessa, e non essendo la suprema autorità ecclesiastica in condizioni, a causa dell'eresia di cui essa stessa è partecipe e portatrice, di fornire ai problemi delle soluzioni obiettive e dirimenti, il dubbio e persino l'errore nelle materie teologiche incerte (mai definite dalla Chiesa) è ahimè una possibilità a cui al momento non si può porre rimedio. Ne consegue dunque che, pur non condividendo nessuna delle innumerevoli posizioni sedevacantiste / sedeprivazioniste che circolano in molti ambienti legati alla Tradizione cattolica, non mi sento di considerarle addirittura scismatiche come feci senza remore all'epoca, ma delle semplici opinioni teologiche la cui possibilità effettiva è estremamente remota.



ARGUMENTS QUI MILITENT CONTRE LE SEDEVACANTISME


Bibliographie conseillée :

Arnaldo Xavier da Silveira, La nouvelle Messe de Paul VI : qu'en penser ?, Ed. Diffusion de la pensée française 1975, pp. 213-334 analyse les cinq opinions discutées par Saint Robert Bellarmin concernant l'hypothèse d'un Pape hérétique (Toute la deuxième partie du livre est consacrée à ce problème).

Le dossier de l'Abbé D. Boulet, Ce Siège est-il vacant ? dans Communicantes – Revue officielle de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour le Canada, Nouvelle Série n° 21 (Oct-Déc 2004), pp. 5-21 offre un résumé du texte précédent, y ajoutant des analyses du phénomène sédévacantiste mise à jour avec la situation de l'Eglise.

Un exposé global des théories sédévacantistes, avec les réponses à leurs objections, c'est Dominicus, Petit catéchisme du sédévacantisme, dans Le Sel de la terre 79 (hiver 2011-2012) pp. 36-47. C'est la deuxième édition revue et augmentée de l'article paru dans Le Sel de la terre 36 (printemps 2001) pp. 113-117.

Sur la question canonique voire l'article du P. Albert O.P., La Constitution apostolique "Cum ex apostolatus" de Paul IV, dans Le Sel de la terre 33 (été 2000) pp. 67-78.

Dominicus, Disputatio à propos de l'« una cum », dans Le Sel de la terre 37 (été 2001) pp. 240-249 sur la signification de la prière qui nomme le Pape dans la Messe.

Dominicus, Réponse à Sodalitium, dans Le Sel de la Terre 41 (été 2002) pp. 235-242, discute spécialement la thèse dite "de Cassiciacum".




Le problème qui m’a été posé (mis en forme) : La Constitution du pape Paul IV "Cum ex apostolatus" déclare qu’aucun hérétique ne peut recevoir validement un office ecclésiastique, pas même s’il s’agit du souverain pontificat. Or, on peut affirmer que les cardinaux Roncalli, Montini, Wojtyla et Ratzinger étaient hérétiques déjà avant de monter sur la chaire de saint Pierre. Donc ils ne sont pas des véritables papes.

 

Réponse

 

I)                   Premier argument canonique.

La Constitution Apostolique de Paul IV "Cum ex apostolatus" du 15 Février 1559 a été abrogée de jure et de facto par la promulgation du Code de Droit Canonique le 27 Mai 1917 (Codex Iuris Canonici, j'abrégerai CIC dans les citations, n'y mentionnant que le Code de 1917). Ce Code abroge toutes les normes précédentes là où la matière est entièrement réorganisée[1], garde la discipline ancienne là où la matière est partiellement réorganisée[2], mais déclare abrogées toutes les anciennes lois pénales qui ne sont pas mentionnées dans le Code[3] (peines spirituelles et temporelles, médicinales et vindicatives, latæ ou ferendæ sententiæ), ainsi que les lois disciplinaires qui n'y sont pas contenues implicitement ou explicitement[4]. La Constitution de Paul IV est exactement une loi pénale inhabilitant, qui prive d'un Office ecclésiastique certaines catégories de personnes (elle avait la particularité de mentionner explicitement le Souverain Pontife comme sujet de la peine), et elle n'est contenue ni implicitement ni explicitement dans le Code. La matière qu'elle traite est totalement réorganisée par plusieurs Canons, dont il faut remarquer surtout les Can. 188, 2264-2265, 2314-2316. Donc elle est automatiquement abrogée. Le CIC édité par les soins du Card. Gasparri[5] cite maintes fois la Constitution "Cum ex apostolatus" de Paul IV comme témoin : ce qui est bien loin de lui conférer de l'autorité comme si elle était encore en vigueur, ces notes n'étant que des simples références des sources des Canons, ou des documents qui traitaient auparavant la même matière[6].

 

II)                Deuxième argument canonique.

Le Can. 160 affirme que l'élection du Pontife Romain n'est réglée que par la Constitution de Pie X "Vacante Sede Apostolica"[7] du 25 Décembre 1904. Les Canons du Code, y compris ceux qui traitent des Offices ecclésiastiques, ne touchent pas à l'élection pontificale en tant que telle. Par ailleurs, en vertu du Can. 22 une loi postérieure abroge la loi antérieure : si elle le dit expressément, si elle est contraire à la loi antérieure, ou si cette nouvelle loi réorganise entièrement la matière de la loi précédente[8]. La Constitution "Vacante Sede Apostolica", qui refond ex integro la législation sur l'élection du Pape, affirme expressément abroger les Constitutions précédentes, sauf certaines exceptions mentionnées[9]. Elle annule, déjà en 1904, les dispositions de la Constitution de Paul IV regardant le Pape. D'ailleurs Saint Pie X établit au Titre II Chapitre IV n° 29 de sa Constitution qu'« Aucun des Cardinaux ne peut en aucune façon être privé de la voix active[10] et passive[11] dans l'élection du Souverain Pontife, sous le prétexte et à cause de n'importe quelle excommunication, interdit, ou empêchement, ou autre cause relevant de l'Eglise. C'est seulement dans le temps de l'accomplissement de cette élection que nous suspendons ces censures et ces excommunications. Elles retrouveront toute leur force le reste du temps et dans toutes les circonstances ». Il n'y a que les cardinaux déposés par le Pape, ou qui ont renoncé à leur dignité, qui sont exclus du droit d'élection[12]. La raison de ce choix est probablement la même qui est explicitée plus avant, lorsque Saint Pie X permet que même une élection simoniaque du Pape, bien que reprouvée et condamnée, soit rendue valide « pour éviter un prétexte de combattre la validité de l'élection du Pontife Romain »[13]. La Constitution de Pie XII "Vacantis Apostolicæ Sedis"[14] du 8 Décembre 1945, qui a remplacé celle de Saint Pie X, reprend au n° 34 les mêmes dispositions au sujet des Cardinaux excommuniés.

 

III)             Troisième argument canonique.

On peut trouver une confirmation de cette non-incompatibilité entre hérésie et juridiction dans la législation de l'Eglise. Le CIC Can. 2314 déclare qu'un apostat, hérétique ou schismatique, est excommunié, et si pertinace après l'avertissement, il est privé de son bénéfice, dignité, office etc., et si clerc il est déposé. Les Can. 2264 et 2265 spécifient qu'un acte de juridiction posé par un excommunié est illicite mais valide ; l'acte n'est invalide que si l'hérétique a reçu une sentence condamnatoire : donc un hérétique ne perd pas sa juridiction par l'hérésie elle-même, ni par l’excommunication, mais sur l'intervention judiciaire de l'autorité ecclésiastique supérieure qui la lui retire par un acte officiel.

 

IV)                   Argument théologique et application.

Cela est l'opinion communior, la plus commune, comme le dit Billuart O.P. dans son Tractatus de Fide Diss. V Art. III : même les hérétiques notoires, s'ils ne sont pas nominalement condamnés, gardent leur juridiction[15]. La réponse de Billuart à la deuxième Objection dans le même Article résout la question hypothétique du Pape hérétique : le Christ garderait la juridiction à un Pape, même hérétique manifeste, pour le bien et la tranquillité de l'Eglise, jusqu'à ce qu'il soit déclaré ouvertement hérétique par l'Eglise[16]. Le R. P. Reginald Garrigou-Lagrange O.P. en donne l'explication dans son traite De Mysterio Incarnationis : tandis qu'une tête physique ne peut exercer d'influence sur les membres sans recevoir l'influx vital de l'âme, une tête morale, comme l'est le pontife (romain), peut exercer une juridiction sur l'Eglise même s'il ne reçoit de l'âme de l'Eglise aucune influence de foi interne et charité[17]. Et le Card. Billot S.J., sur le cas d'un Pape hérétique antérieurement à son élection : « Quoi qu'en soit de la possibilité et de l'impossibilité de cette thèse, on doit tenir fermement comme absolument certaine et entièrement hors de doute que l'adhésion de toute l'Eglise sera toujours à elle seule le signe infaillible de la légitimité de la personne du pape et donc de l'existence de toutes les conditions requises à celle-ci […]. Donc, à partir du moment où le pape est reconnu comme tel et où il se rattache à l'Eglise comme la tête à son corps, on ne doit plus se poser la question d'un éventuel vice d'élection ou d'un défaut au niveau des conditions requises à la légitimité, car l'adhésion de l'Eglise opère comme une sanatio in radice pour annuler tout vice d'élection, et elle montre infailliblement que toutes les conditions requises sont réunies »[18].

« Le Pape est membre de l'Eglise par sa foi personnelle qu'il peut perdre, mais il est la tête de l'Eglise visible par la juridiction et le pouvoir qui peuvent demeurer en même temps qu'une hérésie »[19]. L'argument théologique rejoint et confirme la déclaration canonique. Si on ajoute que l'on n'a pas assez d'éléments qui offrent une certitude absolue pour que 1. l'on puisse dire que les Papes de Jean XXIII à Benoît XVI sont hérétiques formels[20] 2. et pertinaces[21], 3. que de toute façon il ne sont pas des hérétiques notoires (le fait de leur hérésie n'est pas manifeste de jure ou au moins de facto à toute l'Eglise, condition indispensable lorsqu'un acte comme une hérésie interne ou connue par peu de monde ne pourrait pas avoir de conséquences au for externe[22]), et 4. que vraisemblablement il faudrait que l'autorité de l'Eglise, par voix ou des Evêques ou du Collège Cardinalice, constate telle hérésie pour déclarer la « déposition » du Pontife[23] (ce qui ne serait pas un acte de déposition[24], mais une constatation), on ne peut pas présumer que le Saint Siège soit vacant.

 

V)                Argument historique.

Dans l'histoire de l'Eglise on le voit bien : ni Notre-Seigneur ni les Apôtres n'ont jamais déclaré la déchéance de Saint Pierre après son reniement (voir, en concret, apostasie par fragilité) ; ni Saint Paul après le scandale d'Antioche où Saint Pierre semblait convenir avec les judaïsants ; ce n'est pas même arrivé dans les cas historiques d'un Pontife favens hæresi, qui a favorisé l'hérésie, d'une manière ou de l'autre, comme Honorius Ier vers le monothélisme[25] ou Jean XXII sur l'état intermédiaire des âmes saintes avant le jugement universel[26].

 

VI)              Argument d’autorité, ou des Notes théologiques.

Les vérités religieuses sont classées par des Notes théologiques qui établissent le degré d'adhésion de l'intelligence que les fidèles doivent leur porter[27]. Après les vérités de fide catholica et de fide divina[28], et les vérités certaines[29], il y a la sententia communis, ou commune, avis de la presque unanimité des docteurs, dont les plus considérables, et combattue par quelques-uns d'autorité médiocre qui ne sont pas toutefois désavoués par l'Eglise ; et la sententia probabilis, proposition soutenue par des théologiens éminents approuvés par l'Eglise et combattue par d'autres également éminents (selon le nombre de théologiens et leur poids, ou la valeur de leurs raisons, on peut distinguer la sentence probabilior ou plus probable de la sentence tout simplement probable). Parmi les cinq opinions rapportées par Saint Robert Bellarmin sur l'hypothèse du Pape hérétique[30] (six en réalité), les trois principales ne dépassent pas le degré le plus bas d'autorité (probabilis), des théologiens de grande renommée étant partagés à leur sujet ; les autres opinions, ainsi que les différentes thèses sédévacantistes d'aujourd'hui comme celle de Cassiciacum, ne peuvent pas même atteindre ce degré, puisqu'elles ne sont pas soutenues par l'autorité de théologiens éminents et approuvés[31], ou bien elles sont en contradiction avec les théories discutées par les grands théologiens.

 

VII)          Conclusion.

La position sédévacantiste n'étant pas prouvée au niveau spéculatif – ni, peut-être, prouvable – c'est une grande imprudence de la suivre au niveau pratique, imprudence accrue par la gravité de la matière dont il est question et de ses conséquences, et par la témérité, pour des particuliers, de prétendre donner un jugement catégorique sur un problème qui ne peut être résolu que par la plus haute autorité de l'Eglise. Il est donc plus sûr de reconnaître la légitimité du Successeur de Saint Pierre, tout en lui résistant ouvertement quand il parle ou agit contre la doctrine de l'Eglise, préférant obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. Saint Robert le dit[32] : si un Pape menace le bien des âmes ou même l'Eglise entière, il est licite de lui résister en ne faisant pas ce qu'il dit et en empêchant (autant que possible) sa volonté destructrice ; jamais on ne peut le juger, le punir ou le déposer, parce que ce sont les charges d'un supérieur (et le Pape n'en a pas sur cette terre). Lorsque la grande crise de l’Eglise sera résolue, l’autorité ecclésiastique se prononcera définitivement sur la question.

 

[1] Cf. CIC Can. 6 n° 2. Pour l'interprétation du Can. 6 on peut consulter : R. Naz et alii, Traité de Droit Canon, I, Letouzey et Ané 1955, pp. 78-80 ; D.-M. Prümmer O. P., Manuale Juris Canonci, Herder & Co. 1922, pp. 43-55.

[2] Cf. CIC Can. 6 n° 3-4.

[3] Cf. Id. n° 5.

[4] Cf. Id. n° 6.

[5] Codex Iuris Canonici Pii X Pontificis Maximi iussu digestus Benedicti Papæ XV auctoritate promulgatus præfatione, fontium annotatione et indice analytico-alphabetico ab Em̃o Petro Card. Gasparri auctus.

[6] Cf. Naz et alii, op. cit., p. 58.

[7] On le trouve parmi les "Documenta" en appendice au Codex Iuris Canonicis ; une version en français a été éditée en : Documents pontificaux de Sa Sainteté Saint Pie X, I, Publications du Courrier de Rome 1993, pp. 222-244.

[8] Cf. Naz et alii, op. cit., pp. 138-139.

[9] Cf. dans l'Introduction, avant le tit. I, et c'est répété vers la fin du document.

[10] La capacité juridique d'élire le Pape.

[11] La capacité juridique d'être élu Pape.

[12] Cf. n° 31.

[13] Tit. II Chap. VII n° 79.

[14] In Acta Apostolicæ Sedis XXXVIII (1946) pp. 65-99. C'est la gazette officielle du Saint Siège depuis 1909 (je l'abrégerai par la sigle AAS).

[15] Carolus-Renatus Billuart O.P., Summa Sancti Thomæ hodiernis academiarum moribus accomodata, III, Palmé 1872, pp. 263-265 : « Dico : Hæretici etiam manifesti, nisi nominatim denuntiati, aut nisi ipsi recedant ab Ecclesia, retinent jurisdictionem et valide absolvunt ».

[16] Ib. : « Communior tamen sententia tenet, quod Pontifici etiam manifeste hæretico Christus ex speciali dispensatione propter bonum commune et tranquillitatem Ecclesiæ continuet jurisdictionem, donec ab Ecclesia declaretur manifeste hæreticus ».

[17] R. Garrigou-Lagrange O.P., De Christo Salvatore. Commentarius in IIIam Partem Summæ Theologicæ Sancti Thomæ, L.I.C.E. – R. Berruti & C., 1949, p. 232. Le paragraphe entier est remarquable : « Objicit sanctus Bellarminus: Summus pontifex lapsus in hæresim occultam, remanet adhuc Ecclesiæ membrum in actu, nam remanet adhuc caput Ecclesiæ, ut docent Cajetanus, Soto, Cano, Suarez et alii. Respondetur : Hic casus est omnino anormalis, unde non mirum est quod sequatur aliquid anormale, scil. Papa occulte hæreticus non remaneret adhuc Ecclesiæ membrum in actu, secundum doctrinam expositam in corpore articuli, sed retineret adhuc jurisdictionem per quam influeret in Ecclesiam eam regendo. Sic retineret rationem capitis erga Ecclesiam, in quam sic adhuc influeret, et non amplius esset membrum Christi, quia non reciperet influxum vitalem fidei a Christo invisibili et primario capite. Sic modo omnino anormali esset quoad jurisdictionem caput Ecclesiæ et non esset ejus membrum. Hoc non posset esse si ageretur de capite naturali, sed hoc non repugnat pro capite morali secundario. Ratio est quia, dum caput naturale non possit in membra influere nisi recipiat influxum vitæ ab anima, caput morale, qualis est pontifex, potest jurisdictionem exercere in Ecclesiam licet nullum influxum fidei internæ et caritatis ab anima Ecclesiæ accipiat. Brevius, ut dicit Billuart, Papa constituitur membrum ecclesiæ per fidem personalem quam potest perdere, et caput Ecclesiæ visibilis per jurisdictionem et potestatem cum hæresi interna compossibilem. Semper visibilis apparebit Ecclesia in collectione membrorum cum capite visibili, scil. cum Romano Pontifici, quamvis quidam qui exterius apparent membra Ecclesiæ possint esse hæretici interiores. Sic concludendum est quod hæretici occulti sunt solum membra apparentia Ecclesiæ, quam exterius et visibiliter profitentur esse veram ».

[18] Card. L. Billot S.J., L'Eglise, II – Sa constitution intime, Publications du Courrier de Rome 2010, p. 457.

[19] Cf. Garrigou-Lagrange, De Christo Salvatore, cit., p. 232.

[20] Refusant sciemment le Magistère de l'Eglise. Il est vrai que des événements scandaleux (comme les réunions interreligieuses d'Assise) prêtent le flanc au doute, mais l'ambiguïté qui les caractérise ne permet pas d'en donner un dernier mot.

[21] Fixés dans leur jugement pervers après un avertissement de l'Eglise.

[22] Bien que le Card. Jean de Torquemada O.P. soutenait l'opinion selon laquelle un Pape perdrait le Pontificat par une simple hérésie interne, cette idée est en contraste avec les principes les plus élémentaires du droit canon, étant donné le caractère de visibilité de l'Eglise. Cf. A. Xavier da Silveira, op. cit., pp. 242-245. C’est clair. En réalité, aucun membre ne peut être séparé du corps de l’Église pour le simple fait d’une hérésie interne ou, bien qu’externe, connue par peu de gens. L’Église étant une société visible, il faut absolument que ses membres puissent se reconnaître par des liens visibles et sociaux. Or, puisqu’on ne peut pas connaître les secrets des consciences, si l’hypothèse selon laquelle l’hérésie interne suffirait pour être retranché de l’Église était vraie, on ne pourrait plus savoir lesquels de nos frères ou de nos pasteurs feraient partie de l’Église ou non. Et si on ajoutait à cela l’hypothèse de la perte de la juridiction par l’hérésie interne, la structure de l’Église en serait dissolue, et on vivrait dans la suspicion continuelle. Cf. Billot, op. cit., II, pp. 42, 52-67.

[23] L'opinion des théologiens est controversée sur ce dernier point. Ceci est l'avis du Card. Cajetan O.P., Jean de Saint Thomas O.P., Billuart O.P., Suarez S.J. Au contraire Saint Robert Bellarmin S.J., le Card. Billot S.J. et Cano O.P. soutiennent que le Pape serait déposé ipso facto dès que son hérésie serait manifeste. Beaucoup d'entre les théologiens, dont les mêmes Bellarmin, Suarez et Billot, pensent en réalité que le Pape ne pourra jamais tomber dans l'hérésie formelle, et essaient de résoudre seulement une question posée par hypothèse. Cf. A. Xavier da Silveira, op. cit., pp. 218-281 ; Card. L. Billot S.J., op. cit., II, pp. 445-458 ; Card. C. Journet, L'Eglise du Verbe Incarné, I, Desclée de Brower 1941, pp. 595-597.

[24] L. Billot, op. cit., II, p. 450 : « Cela s'explique pour une raison d'ordre général, car un supérieur ne peut pas être démis de sa charge par un inférieur. Or, le Pape est au-dessus de tous les membres de l'Eglise, de chacun d'eux et de tout leur ensemble, qu'ils soient considérés de façon distributive ou collective. Et cette supériorité vaut non seulement à l'ordinaire, mais aussi en toute circonstance particulière […] C'est pourquoi, on doit juger que l'opinion des gallicans équivaut sur ce point à ce qu'il disent par ailleurs de la supériorité du concile sur le pape, thèse qui a fini pour représenter une hérésie, depuis la définition du concile du Vatican ». Cf. Pie II, Bulle "Execrabilis" du 8 Janvier 1460 in H. Denzinger – A. Schönmetzer, Enchiridion Symbolorum definitionum et declarationum de rebus fidei et morum, Herder 1976 (abrégé DS) n° 1375 ; Concile Vatican I, Constitution dogmatique "Pastor Æternus" du 18 Juillet 1870 in DS 3063 ; CIC Can. 1556 et 2332.

[25] Si le III Concile de Constantinople a excommunié le pape Honorius (après sa mort, cf. DS 550 et 552), ce n’est pas autant qu’hérétique, mais à cause de son imprudence et de sa condescendance vers le patriarche de Constantinople, qui lui avait présenté une formule ambiguë pour le tromper. Honorius avait approuvée cette formule parce qu’il la croyait une solution de compromis.

[26] Cf. Jean XXII, Bulle "Super his" du 3 Décembre 1334, in DS 990-991, dans laquelle le Pape rétracte devant le Consistoire son opinion théologique, qu'il avait exprimé à titre de docteur privé. Mort juste le lendemain, le 4 Décembre, son successeur immédiat Benoît XII a promulgué la Constitution "Benedictus Deus" du 29 Janvier 1336, in DS 1000-1002, où il définit comme catholique la doctrine opposée à l'erreur de Jean XXII.

[27] Cf. AA.VV., Sommaire de Théologie dogmatique, Editions du bien public 1969, pp. 18-19. Sur le poids en théologie du consensus des théologiens Cf. : Vincentius Lirinensis, Commonitorium, I.28, in J.-P. Migne, Patrologiæ cursus completus, Series latina, L, col. 675-378 (j'abrégerai la Patrologia Latina de Migne par ML) ; Pie IX, Epître "Tuas Libenter" à l'archevêque de München-Freising du 21 Décembre 1863 in DS 2876 et 2879-2880 ; Id., "Syllabus" du 8 Décembre 1864 in DS 2913 (proposition condamnée) ; J. V. De Groot O.P., Summa apologetica de Ecclesia ad mentem S. Thomæ Aquinatis, G. Manz 1906, pp. 783-820; V. Zubizarreta O.C.D., Theologia dogmatico-scholastica ad mentem S. Thomæ Aquinatis, I, Ediciones "El Carmen" 1948, pp. 537-538 et 540-542.

[28] Vérités révélées certainement par Dieu dans la Sainte Ecriture ou la Tradition, dont les premières ont été solennellement définies ex cathedra par le Souverain Pontife ou un Concile Œcuménique, ou sont présentée comme telles par le Magistère ordinaire et universel. Cf. Concile Vatican I, Constitution "Dei Filius" du 24 Avril 1870, Chap. III in DS 3011.

[29] Conclusions théologiques dont une des prémisses est révélée.

[30] Saint Robert Bellarmin, De Summo Pontifice, livre II chap. XXX, in Opera Omnia Roberti Bellarmini, I, Vivès 1870, pp. 608-611.

[31] Avec tout le respect pour l'intelligence brillante du R. P. M.-L. Guérard des Lauriers O.P., on ne peut pas le mettre au même rang qu'un Saint Robert, qu'un Cajetan, qu'un Jean de Saint Thomas ou qu’un Billot.

[32] Saint Robert Bellarmin, op. cit., I, p. 607 : « Itaque, sicut licet resistere Pontifici invadenti corpus, ita licet invadenti animas, vel turbanti Rempublicam, et multo magis si Ecclesiam destruere nitetur: licet, inquam, ei resistere, non faciendo quod jubet, et impediendo ne exequatur voluntatem suam ; non tamen licet eum judicare, vel punire, vel deponere, quod non est nisi superioris ». Cf. aussi Saint Thomas d'Aquin, Somme Théologique, IIa-IIæ Question XXXIII article 4 ad 2um.


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